L’horizon de Sky s’assombrit, la liste des maladies dont Froome souffre est impressionnante
L’affaire Froome pourrait être un coup fatal porté à l’équipe britannique
- Publié le 14-12-2017 à 11h48
- Mis à jour le 14-12-2017 à 12h00
L’affaire Froome pourrait être un coup fatal porté à l’équipe britannique
Est-il possible de prôner la tolérance zéro en matière de dopage et de flirter continuellement avec les limites du règlement pour s’octroyer quelques gains marginaux ? Au demeurant, ce grand écart semble inconfortable, voire périlleux. C’est pourtant ce qu’essayent de faire le team Sky et Dave Brailsford depuis 2010. Mais à force de jouer avec le feu, les membres de cette puissante armada vont bien finir par se brûler.
Au-delà de la magnitude du nouveau séisme qui secoue la planète cyclisme, c’est le rythme auquel s’enchaînent les révélations autour de l’équipe britannique qui devient inquiétant. Car la Sky a déjà défrayé la chronique en novembre dernier. L’UKAD (Agence antidopage britannique) avait d’abord mis un terme à une enquête ouverte en septembre 2016, concernant un colis suspect reçu en 2011 par le médecin de Bradley Wiggins.
Les charges à l’encontre de la fédération britannique et du Team Sky avaient alors été abandonnées sans que l’enquête ne conclue à l’innocence des parties concernées. Mais quelques jours plus tard, Shane Sutton jetait un pavé dans la mare en faisant des révélations fracassantes à propos de l’utilisation, parfois intempestive, des AUT (autorisation d’usage à des fins thérapeutiques). L’ancien entraîneur de la Sky admettait que certains gains marginaux pouvaient être obtenus grâce aux AUT puisque "le règlement permet de le faire". Ces confidences faisaient écho au passé trouble de l’équipe britannique en matière d’AUT.
En effet, les Fancy Bears, groupe de hackers russes, avaient révélé en 2016 que Bardley Wiggins avait eu recours à une autorisation pour l’usage du triamcinolone, un corticoïde, lors de sa victoire dans le Tour 2012. Alors que sur le Tour de Romandie 2014, Chris Froome, qui souffrait d’un refroidissement, avait bénéficié d’une AUT pour utiliser par voie orale une dose conséquente de prednisolone, un autre corticoïde.
L’équipe dirigée par Dave Brailsford, a donc fait de l’exploitation du règlement, et de ses failles, une spécialité. Le Daily Mai l a même révélé en mars 2017 que le Team Sky aurait testé les effets du Viagra sur la performance sportive lors d’un camp d’entraînement.
Et cette capacité à aller chercher des gains marginaux partout où ils se trouvent, en dépit des questions éthiques que cela engendre, se retrouve dans d’autres domaines que la médecine. L’utilisation d’une combinaison englobant des bandes de vortex lors du contre-la-montre de Düsseldorf, sur le Tour de France 2017, avait également déclenché un vif débat.
Fidèle à son habitude et fort de son expérience pour gérer les polémiques, Dave Brailsford, s’est rapidement exprimé sur le contrôle positif de Chris Froome avec son calme habituel.
Mais cette partie s’annonce plus compliquée à gagner que les précédentes pour le manager britannique.
Chris Froome, très ferme sur le dopage, se retrouve lui-même confronté au problème
"Je connais les bons et les mauvais côtés de l’histoire du maillot jaune. Je ne le bafouerai jamais." Chris Froome, auteur de cette déclaration sur le podium du Tour 2015, n’a effectivement pas, pour l’instant, humilié l’histoire du Tour de France. Mais, en étant reconnu positif au salbutamol, le coureur britannique a sérieusement bafoué le maillot rouge de leader de la Vuelta.
Pourtant, le leader de la Sky a toujours clamé haut et fort sa probité. Depuis ses premiers coups de force sur le Tour de France, il a dû faire face à la suspicion.
Car sa façon de gagner rappelle étrangement celle d’un de ses prédécesseurs, désormais descendu de son piédestal. "On m’accuse d’être un tricheur et un menteur, ce n’est pas cool. Lance (Armstrong) a triché, je ne triche pas. Point final."
L’image de chevalier blanc, que voulait se donner Chris Froome, est une première fois écornée sur le Critérium du Dauphiné 2014 lorsque le Britannique se saisit d’un inhalateur à 20 kilomètres de l’arrivée de la deuxième étape.
La scène, retransmise sur les télévisions du monde entier, fait alors sensation. "Il n’a pas besoin d’AUT (autorisation d’usage thérapeutique). Il a de l’asthme. D’où ses quintes de toux après l’effort", expliquait alors, via Twitter, Michelle Cound, la compagne du cycliste britannique.
Pourtant, Chris Froome va lui-même contredire ces affirmations deux ans plus tard, à la suite des révélations des Fancy Bears, le groupe de hackers russes. "J’ai déjà évoqué publiquement mes autorisations d’usage dans les médias et je n’ai aucun problème avec ces fuites qui confirment mes déclarations. En neuf ans sur le circuit professionnel, je n’ai eu recours que deux fois à des autorisations d’usage pour de l’asthme, la dernière fois en 2014."
Désormais dans l’œil du cyclone, Chris Froome n’a plus qu’à espérer que ses déclarations à propos du dopage ne se retournent pas contre lui. "Je pense que la première suspension, qui est actuellement de deux ans, pourrait être beaucoup plus dure. Il doit être beaucoup plus clair que si tu enfreins les règles et que tu essaies de tricher, il n’y aura plus de place pour toi", déclarait le quadruple vainqueur du Tour en 2013.
S’il est avéré qu’il a triché, le leader de la Sky n’a plus qu’à prier pour que l’Uci ne suive pas ses propres recommandations.
La liste des maladies dont Froome souffre ou a souffert est impressionnante
Le vainqueur du Tour 2017 n’est pas seulement asthmatique. Un test effectué en 2009 a révélé qu’il était infesté par la bilharziose, une maladie parasitaire, due à un ver hématophage, très présente en Afrique. La disparition totale de cette affection n’a été constatée que fin 2013, après sa première victoire dans le Tour. "Enfin, je suis libéré de la maladie affaiblissante de la bilharziose. Ce sont de fantastiques nouvelles pour moi. Je ne vais plus devoir m’inquiéter de cela", déclarait, alors, Chris Froome au quotidien anglais The Independent.
Mais la liste des affections touchant ou ayant touché le coureur britannique ne s’arrête pas là. C’est ce qu’a révélé Antoine Vayer, enseignant et entraîneur de cyclisme, dans une chronique intitulée Une performance à la limite de la suspicion, parue dans Le Monde le 22 juillet 2017. "Avant 2011, il aura rendu visite à pas moins de huit médecins dans six cliniques ou hôpitaux dans quatre pays, se voyant prescrire au moins six traitements distincts pour cinq maladies différentes, le tout en seulement trois ans."
Outre l’asthme et la bilharziose, l’entraîneur français indiquait que Chris Froome a aussi souffert de fièvre typhoïde, d’urticaire et de blastocystose. Cette dernière affection, déclenchée par un parasite présent dans les intestins, entraîne des diarrhées, des crampes abdominales et une perte de poids. D’après les informations du Daily Mail, Chris Froome était guéri de cette affection "juste à temps pour le Tour de France 2012."
Le leader de la Sky a donc dû vaincre l’ensemble de ces troubles avant de pouvoir exprimer la totalité de son potentiel sur le vélo. Ces combats lui ont sans doute permis de se forger un mental d’acier. Une qualité dont il aura bien besoin pour batailler face à la suspicion, une des pires maladies qui soient.